Texte
2 les Âmes fortes , folio
pp. 326 à 327
Jean
Giono est né en 1895 à Manosque. En 1949, il publie les
Âmes
fortes.
Ce roman fait partie d'un ensemble de romans appelé Chroniques
romanesques. Ces
romans décrivent une société dans laquelle les personnages sont
extraordinairement intelligents, manipulateurs. Avec peu de chose,
ils s'inventent des vies captivantes. Ils sont là, à l’affût, là
où les autres ne voient rien, ils trouvent tout ce dont ils ont
besoin ; ils sont patients, attentifs, manœuvrent dans l'ombre,
attendent leur heure. Ces sont des âmes fortes. Les
Âmes fortes est
un roman dialogué qui prend naissance lors d'une veillée mortuaire
à laquelle assiste Thérèse alors âgée de quatre-vingt-neuf ans,
nous sommes en 1949. Ce roman est l’œuvre de deux conteuses
hors-pair : une veilleuse anonyme et Thérèse. Ces deux récits
oraux qui font un retour dans le passé de Thérèse s'enchevêtrent
et se contredisent. Dans
l'extrait soumis à notre étude,
c'est
le récit de Thérèse. C'est la narratrice Thérèse qui raconte
Thérèse-personnage. Thérèse explique sa stratégie pour
s'accaparer celle qu'elle désigne par un
pronom démonstratif « celle-là » (curieusement, la
commère et Thérèse emploient le même terme pour désigner Mme
Numance : Thérèse et la commère ne serait-elle qu'une même
personne?)
car elle ignore son identité. En
quoi la stratégie de Thérèse révèle-t-elle son appétit de
conquête ? En quoi est-elle une âme forte ? Nous
étudierons dans une première partie les éléments de sa stratégie
et nous verrons ensuite comment deux désirs apparemment
complémentaires peuvent s'accorder ou non par le jeu de l'écriture.
I
la
stratégie de Thérèse
a)
un témoignage personnel
Cet
extrait raconte la stratégie mise en œuvre par Thérèse pour
s'accaparer Mme Numance dont elle ignore alors l'identité . La
narratrice Thérèse parle d'elle-même. Nous avons donc un
narrateur-personnage et un point de vue interne. Mais ce n'est pas
sûr. En effet, la narratrice prête des pensées à Mme Numance :
« Elle se disait : « C'est aujourd'hui que je lui
parle ? » ». Et cela va très loin, puisque tout au
long de cet extrait nous avons des explications sur la conduite de
Mme Numance qui ne peuvent venir que d'une connaissance très
profonde de son moi intérieur. Thérèse connaît un peu le passé
de Mme Numance : « Je savais qu'elle n'était jamais
arrivée trop tard ». Thérèse n'est donc pas seulement la
narratrice de son propre personnage mais aussi une auteure à égalité
avec la commère.
b)
Un combat :
L'activité
de Thérèse s'apparente à un « combat », voire « une
bataille un peu plus serrée ». C'est elle qui mène, qui
dirige l'action. Thérèse a fait le choix de sa proie. Mais elle
choisit de la faire « mijote(r) » dans son « jus ».
c)
Le faux sommeil et la pitié :
Thérèse
veut créer la pitié chez Mme Numance. C'est donc qu'elle connaît
parfaitement le désir de Mme Numance qui est donner sans compter,
jusqu'à la ruine. Pour faire pitié, Thérèse se sert de son corps
comme un instrument : elle s'est entraînée et est devenue
enceinte, elle s'est fait renvoyer de sa place à l'auberge de
Chatillon pour qu'on lui donne une cabane à lapin. Elle oppose la
« palatine fourrée » de Mme Numance à son caraco troué.
Son faux sommeil lui permet de dominer la situation. A travers ses
yeux mi-clos elle surveille Mme Numance. Elle se transforme en
« chat(s) » qui ne dort que d'un œil.
II
Deux désirs apparemment contradictoires :
a)
Le désir de Thérèse
Thérèse
a un désir : celui de s'accaparer Mme Numance, d'en faire sa
proie. Mais Thérèse, et nous le savons dans ses récits antérieurs,
n'aime pas l'argent contrairement à Firmin. Thérèse organise sa
conquête et Firmin n'a plus qu'un rôle subalterne. Il n'est
d'ailleurs même pas nommé.
b)
Le désir de Mme Numance
Mme
Numance a une passion qui est de donner jusqu'à la ruine. Donc nous
avons deux personnages : l'un veut s'accaparer une personne,
l'autre tout donner.
En
conclusion, Thérèse et Mme Numance s'affrontent. Dans cet
extrait nous voyons la stratégie organisée par Thérèse pour
organiser la prise de Mme Numance. Le troisième extrait nous
montrera une Thérèse désarçonnée par la disparition de Mme
Numance. Alors qui aura gagné cette « bataille »
Texte
3 les Âmes fortes folio pp.
332 à 333
Jean
Giono est né en 1895 à Manosque. En 1949, il publie les
Âmes
fortes.
Ce roman fait partie d'un ensemble de romans appelé Chroniques
romanesques. Ces
romans décrivent une société dans laquelle les personnages sont
extraordinairement intelligents, manipulateurs. Avec peu de chose,
ils s'inventent des vies captivantes. Ils sont là, à l’affût, là
où les autres ne voient rien, ils trouvent tout ce dont ils ont
besoin ; ils sont patients, attentifs, manœuvrent dans l'ombre,
attendent leur heure. Ces sont des âmes fortes. Les
Âmes fortes est
un roman dialogué qui prend naissance lors d'une veillée mortuaire
à laquelle assiste Thérèse alors âgée de quatre-vingt-neuf ans,
nous sommes en 1949. Ce roman est l’œuvre de deux conteuses
hors-pair : une veilleuse anonyme et Thérèse. Ces deux récits
oraux qui font un retour dans le passé de Thérèse s'enchevêtrent
et se contredisent. Dans
l'extrait soumis à notre étude,
nous
trouvons trois récits qui se succèdent : le premier passage
raconté par Thérèse dans lequel elle anticipe la la fuite de
Sylvie Numance, le second passage est un dialogue, de
retour au temps de l'énonciation, c'est
à dire la veillée mortuaire du « pauvre Albert »
entre la veilleuse anonyme que Giono appelle « le Contre »
et Thérèse. Ce court dialogue fait une soudure avec le récit de la
veilleuse. Cette dernière enchaîne avec la suite de son récit qui
est
le récit de la disparition de Mme Numance et des efforts rageurs de
Thérèse pour la retrouver. Nous
suivrons donc les mouvements du texte. En quoi ces trois récits font
de Thérèse et de la veilleuse anonyme les auteures du récit ?
Nous verrons dans une première partie comment les
trois récits qui s'enchevêtrent révèlent l'absence de vérité
ensuite nous étudierons dans une deuxième partie comment
Thérèse prend le dessus physiquement sur Firmin et enfin nous
verrons les conséquences de la disparition de Mme Numance
I
Trois récits
a)
Celui de Thérèse qui est la suite de son récit sur sa prise. Mais
elle annonce également sa fin. Ce n'est pas elle qui triomphera. Ce
qui est remarquable dans ce récit, c'est l'absence de résultat :
la quasi adoption de Thérèse par Mme Numance, la ruine des Numance
causée par le plan de Firmin et de Reveillard et ce qui en découle,
c'est à dire la ruine et la mort de M.Numance. Non, tout ce que
retient Thérèse c'est la disparition de Mme Numance.
b)
Retour à la veillée mortuaire c'est à dire au présent
d'énonciation.
Dialogue
entre Thérèse et la commère qui reprend son récit comme elle
l'annonce : « je continue »
C)
le récit de la commère : narrateur externe mais point de
vue omniscient. La commère raconte la disparition de Mme Numance
conséquence de la mort de M.Numance et de leur faillite.
II
Thérèse prend le dessus
a)
Les transformations de Thérèse : Thérèse
pleurniche « comme une chatte », devient un cheval qui
« hennissait » puis un « chat sauvage ». La
part animale de Thérèse prend le dessus. Firmin l'appelle :
« foutue bête ». Elle marche comme « un ivrogne ».
Toutes
ces métamorphoses successives sont dues à la perte, celle de Mme
Numance.
b)
Le combat entre Thérèse et Firmin.
Depuis
le début du récit, nous savons que si Firmin est manipulé par
Thérèse quand c'est Thérèse qui raconte, Firmin bat régulièrement
Thérèse. Dans cette scène, Thérèse est animée d'une force
supplémentaire, celle qu'elle a recueilli dans la disparition de Mme
Numance. Elle prend donc le dessus sur Firmin qui désormais n'aura
jamais plus le dessus. Il ne fait pas partie des âmes fortes. Les
deux âmes fortes sont Thérèse et Mme Numance
III
les conséquences de la disparition de Mme Numance
Mme
Numance disparaît. Alors que Thérèse espérait gagner la partie,
au moment où la faillite des Numance se confirme, Mme Numance
remporte la partie. Elle disparaît dans la nature pour toujours. Son
prénom est Sylvie ce qui veut dire la forêt. On peut sans risque
l'assimiler à Démeter, la déesse de la nature. Thérèse devenant
Perséphone celle qui a épousé Hadès/Firmin qui est forgeron. Ce
qui explique que Sylvie Numance cherche dans « le jardin »,
« sous les buissons », « dans les branches basses
des arbres ».
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