lundi 8 mai 2017

1re séquence :"A la recherche du bonheur" Introduction au texte de Lucrèce, De rerum natura, chant II, vers 1 à 37

INTRODUCTION
Lucrèce, De rerum natura, « chant II », vers 1 à 37


 Lucrèce :
Dans son De rerum natura, Lucrèce, poète latin du premier siècle avant J.-C., illustre la philosophie d'Epicure, philosophe grec qui vécut de -341 à -270. L'épicurisme s'oppose au stoïcisme qui prône la vertu, et au contraire réalise le bonheur dans la satisfaction des sens, mais sans excès. Lucrèce, dans les premiers vers du chant II, illustre la philosophie épicurienne du bonheur. Ce bonheur est un lieu d'où l'on peut observer sans crainte la folie des hommes mus par l'ambition et la cupidité. L'époque dans laquelle vécut Lucrèce était celle de la guerre civile, et le retrait de la vie publique est pour le sage la possibilité de vivre sans crainte. Ce lieu du bonheur qui ressemble à un jardin est un lieu simple, éloigné du luxe, entouré d'amis. C'est également le lieu du savoir ; l'activité intellectuelle étant la plus à même de combler l'homme.Comme toujours chez Lucrèce, traductions visuelles d'idées abstraites : tempête sur la mer, scène de bataille, errance des humains.
  Notre extrait ouvre le chant II. Lucrèce y fait l'éloge de la vie philosophique et en définit le cadre par rapport à la société contemporaine.
 (problématiques possibles ) En quoi les règles de vie, c'est à dire la morale de Lucrèce, sont-elles une philosophie du bonheur ?  
(plan) Nous verrons en quoi consiste la vie des hommes ordinaires et nous l'opposerons à celle du philosophe épicurien décrit par Lucrèce.

I La vie des hommes ordinaires :

A. La difficulté de vivre :
La métaphore de la traversée en bateau : pleine de naufrages et de tempêtes, représente la vie difficile des hommes qui ne sont pas des philosophes. Ces hommes « erre[ent] » sans trouver le « chemin de la vie », ils vivent dans le « tourment » (V.3). Pire, ils sont « aveugles », c'est à dire qu'ils ne savent pas quel chemin prendre, au sens figuré, dans leur vie.
B. L'ambition et la violence :
L'aveuglement de l'homme le pousse à se battre (V.5 – V6). Lucrèce parle des « grands combats de la guerre ». Ces luttes ne sont pas seulement guerrière. Elles existent également dans les luttes de tous les jours pour « rivalis[er] de talent » (V11) mais aussi pour conquérire la « gloire nobiliaire ». Cette gloire, celle de la noblesse, est due au hasard de la naissance mais peut se perdre. Donc les nobles doivent se battre tous les jours pour garder cette gloire héritée de leurs ancêtres. Les hommes ne se contentent pas de ce qu'ils ont mais cherchent par « un labeur intense » à obtenir plus. Il leur faut « l'opulence », c'est à dire la richesse. Celle qui permet d'avoir une maison avec des « lambris dorés », des « statues dorées d'éphèbes », « une maison brillant d'or et reluisant d'argent » (V.28)
L'homme est responsable de ses malheurs. Il n'est pas obligé d'être un « Pitoyable[...] esprit[...] » (V.14). Lucrèce oppose aux hommes malheureux la philosophie d'Epicure. Cela signifie que rien n'est inéluctable et que chacun peut être heureux s'il suit les recommandations du philosophe Epicure.



II Le philosophe épicurien

A. Les leçons de la philosophie :
Le philosophe, c'est à dire celui qui suit les préceptes d'Epicure, doit se situer hors des hommes. Il doit prendre de la hauteur : « rien n'est plus doux que d'habiter les hauts lieux ». Le philosophe n'est pas aveugle, il voit le malheur des hommes, il ne tire aucun plaisir à voir les autres souffrir : « il nous plaît de voir à quoi nous échappons »(V.4). Il comprend donc les difficultés des hommes.

B. La nature comme remèdes :
Le philosophe doit écouter la nature pour savoir quels sont ses besoins indispensables. (Epicure se contentait d'un verre d'eau et d'un morceu de pain).
Au début du texte, la mer est une nature en folie, destructrice : « les vents soulèvent la mer immense » (V.1). A la fin du texte, « la rivière » accompagne les philosophes étendus sur l'herbe. La nature aquatique est d'abord furie puis apaisement.
Quels sont les besoins à satisfaire pour éprouver du plaisir et donc accéder au bonheur ?
-Eviter les douleurs physiques : « «que la douleur soit éloignée du corps » (V18).
-Rechercher le plaisir pour l 'esprit, c'est à dire se cultiver, réfléchir, obtenir par l'étude « le savoir des sages » (V.8)
-Eviter les inquiétudes, craintes pour l'esprit :  « que l'esprit jouisse de sensations heureuses » (V.19)
-Cultiver l'amitié : « entre amis » (V30)
-donner du plaisirs aux sens : « bien peu de choses sont nécessaires à la nature corporelle » (V.22) Attention, si l'épicurisme est une philosophie matérialiste, elle réfute tous les excés : manger quand on a faim, mais pas plus.
En résumé , le plaisir est obtenu par l 'absence de douleur physique et morale.

C. Régler sa vie :Quelles sont les conséquences pour la vie du philosophe ?
Le philosophe doit éviter la douleur et donc ne pas se battre, éviter les guerres, les troubles politiques, les disputes , etc. Il va donc s'isoler à la campagne d'où il pourra « voir » les malheurs des hommes. Le refuge idéal ressemble à un jardin pourvu d'un « grand arbre » et au bord d'une « rivière ». Attention, ce n'est pas le malheur des autres qui le réjouit (comme le dit le proverbe), pas du tout, mais c'est voir à quoi il a échappé. Et qui justifie sa décision de se retirer des affaires humaines (Lucrèce vivait au moment des troubles politiques à Rome).
Cette vie n'est pas solitaire, puisque le philosophe va vivre au milieu de ses amis, loin du luxe. Le philosophe transmettra ces réflexions aux autres hommes. Ainsi Lucrèce écrit ce poème didactique pour enseigner la sagesse d'Epicure.

En conclusion, Lucrèce oppose dans ce poème la vie des hommes ordinaires faites de troubles et de violences à celle heureuse des philosophes épicuriens qui trouvent le bonheur dans le retrait de la vie publique, dans l'écoute de la nature, celle du corps. Et dans les conversations philosophiques.



Le sage prend du plaisir à échapper à la condition humaine commune.
- L'idéal décrit est celui de l'ataraxie, c'est-à-dire l'absence de troubles. Cet idéal est poursuivi de façons diverses par les stoïciens, les sceptiques, et bien sûr les épicuriens. Voici ce qu'en dit Epicure :

« Disons que le plaisir est le but de la vie, nous ne parlons pas des plaisirs de l'homme déréglé, ni de ceux qui consistent dans les jouissances matérielles, ainsi que l'écrivent des gens qui ignorent notre doctrine, ou qui la combattent et la prennent dans un mauvais sens. "Le plaisir dont nous parlons est celui qui consiste, pour le corps, à ne pas souffrir et, pour l'âme, à être libérée de tout souci.[1] » 
Epicure, Lettre à Ménecée


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