jeudi 2 novembre 2017

Séquence 2 Comment les poètes traduisent la fuite du temps, texte complémentaire : Baudelaire, "L'Horloge"


https://drive.google.com/file/d/0B4OSt_hVPMKcZ0dtM3BONXp4QUk/view?usp=sharing


Horloge ! dieu sinistre, effrayant, impassible,
Dont le doigt nous menace et nous dit : «Souviens-toi !
Les vibrantes Douleurs dans ton coeur plein d'effroi
Se planteront bientôt comme dans une cible,

Le Plaisir vaporeux fuira vers l'horizon
Ainsi qu'une sylphide au fond de la coulisse ;
Chaque instant te dévore un morceau du délice
À chaque homme accordé pour toute sa saison.

Trois mille six cents fois par heure, la Seconde
Chuchote : Souviens-toi ! - Rapide, avec sa voix
D'insecte, Maintenant dit : ‘’Je suis Autrefois,
Et j'ai pompé ta vie avec ma trompe immonde !’’

Remember ! Souviens-toi, prodigue ! Esto memor !
(Mon gosier de métal parle toutes les langues.)
Les minutes, mortel folâtre, sont des gangues
Qu'il ne faut pas lâcher sans en extraire l'or !

Souviens-toi que le Temps est un joueur avide
Qui gagne sans tricher, à tout coup ! c'est la loi.
Le jour décroît ; la nuit augmente ; souviens-toi !
Le gouffre a toujours soif ; la clepsydre se vide.

Tantôt sonnera l'heure où le divin Hasard,
Où l'auguste Vertu, ton épouse encor vierge,
Où le Repentir même (oh ! la dernière auberge !),
Où tout te dira : Meurs, vieux lâche ! il est trop tard !»


           Charles BAUDELAIRE, « L’horloge »Les Fleurs du Mal (1857)


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